Travaux supplémentaires et marché forfaitaire : attention au piège !

Cabinet CMC AvocatDroit de l’immobilier et de la construction

Il existe trois principaux types de marchés privés : le marché au métré, le marché sur dépenses contrôlées et le marché au forfait.

 

Le marché au forfait se retrouve à l’article 1793 du Code civil et est définit comme un contrat au sein duquel les travaux sont définis dans leur nature et leur consistance, d’après un plan arrêté et convenu, et le prix est fixé à l’avance.

On dit alors que le prix d’un marché au forfait est forfaitaire, ferme et définitif.

Le marché au forfait est fréquemment choisi en raison de ses nombreux avantages, notamment pour le maître d’ouvrage, qui connaît dès la conclusion du contrat le prix global des travaux.

 

Si le marché à forfait présente de nombreux avantages pour le maître d’ouvrage, il peut rapidement se transformer en piège pour l’entrepreneur.

En effet, au cours de l’exécution de chantier, il est fréquent que travaux non prévus initialement surviennent.

Cette situation peut survenir pour diverses raisons, telles que des demandes supplémentaires du maître d’ouvrage ou encore des travaux devenus indispensables en cours d’exécution.

 

Ces nouveaux postes, communément appelés travaux supplémentaires, peuvent engendrer de nombreuses difficultés pour les entrepreneurs.

L’article 1793 du Code civil pose le principe de l’intangibilité du prix du marché.

En d’autres termes, le principe du marché à forfait est que l’entrepreneur ne peut solliciter du maître d’ouvrage une augmentation du prix initialement convenu.

Pour exemple, les travaux supplémentaires nécessaires à l’exécution du marché de travaux en ce qu’ils sont indispensables à la réalisation des ouvrages dans les règles de l’art, ne peuvent donner lieu à une facturation supplémentaire de la part de l’entrepreneur.

Il appartenait alors au constructeur de prévoir en amont ces ouvrages dans le contrat.

 

Comme tout principe en droit, il existe des exceptions.

 

Toutefois et en matière de marchés au forfait, ces exceptions sont strictement encadrées par la Cour de cassation et sont au nombre de trois :

  1. Autorisation écrite du maître de l’ouvrage
  2. Bouleversement de l’économie du contrat
  3. Acceptation expresse et non équivoque du maître de l’ouvrage sur les travaux supplémentaires réalisés par l’entrepreneur

Ces exceptions sont soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond qui font une appréciation in concreto des faits d’espèces.

En cas d’autorisation écrite se présentant, par exemple, sous forme de devis de travaux supplémentaire daté et signé par le maître de l’ouvrage, la question des travaux supplémentaires ne pose pas de difficulté particulière.

Le bouleversement de l’économie du contrat est généralement admis par les tribunaux lorsque le pourcentage d’augmentation du coût des travaux est de l’ordre de 25 à 30%, à condition que ces modifications résultent de la demande du maître de l’ouvrage.

 

Pour exemple, une erreur de métré de l’entrepreneur entraînant une hausse du coût des travaux ne peut être qualifié de bouleversement de l’économie du contrat.

L’exception qui pose le plus de difficultés en la matière est la preuve de l’acceptation expresse et non équivoque du maître de l’ouvrage.

La démonstration de ces caractères appartient à l’entrepreneur qui sollicite le paiement de ses travaux supplémentaires.

L’acceptation doit émaner du maître de l’ouvrage lui-même sauf à rapporter la preuve d’un mandat spécial donnée au maître d’œuvre.

Véritable problématique lors de l’exécution des marchés à forfait, la Cour de cassation a récemment rappelé le principe selon lequel « lorsqu’un entrepreneur s’est chargé de la construction à forfait d’un ouvrage, il ne peut réclamer le paiement de travaux supplémentaires que si ces travaux ont été préalablement autorisés par écrit et leur prix préalablement convenu avec le maître de l’ouvrage ou si celui-ci les a acceptés de manière expresse et non équivoque, une fois réalisés. »

Et a précisé que le silence du maître de l’ouvrage à réception du mémoire définitif ou le non-respect de la procédure d’établissement du décompte général et définitif ne vaut pas acceptation expresse et non équivoque des travaux supplémentaires contenus au sein du mémoire définitif et dont l’entrepreneur demande le paiement.

(Arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 8 juin 2023 – n°22-10.393)

 

Cet arrêt vient une nouvelle fois rappeler la stricte application qui est faite de l’acception expresse et non équivoque du maître d’ouvrage dans le cadre de travaux supplémentaires dans un marché au forfait.

La tendance jurisprudentielle en la matière appelle à la plus grande prudence.

 

Le cabinet CMC AVOCATS peut vous proposer une solution adaptée à votre situation afin de répondre à vos interrogations et vous accompagner dans vos démarches de recouvrement de factures impayées et contestées par le maître de l’ouvrage.